SPOILER ALERT : Si vous êtes psychologues et que vous lisez cet article, l’OMS recommande une prise de Xanax avant toute lecture puisque l’article ci-dessous traite d’un sujet qui fait hérisser les poils incarnés les plus profonds : Monsoutienpsy. J’en appelle donc à vos plus beaux mécanismes de défense pour rester courtois et respectueux en commentaires.

Dépression, anxiété, addiction, burn-out… Depuis quelque temps, nous sommes face à une explosion des troubles psys. La santé mentale est sur toutes les lèvres. À tel point qu’évoquer son mal-être face cam’ devient même « tendance » sur les différents réseaux sociaux. Passant du tabou au Trending Topic, aller papoter avec un psy s’est popularisé. Mais entre l’envie de rencontrer un psy et le faire, il y a un (petit) obstacle : la thune.

Et oui, prendre soin de sa santé mentale a un prix et ça Manu l’a enfin compris. Monsoutienpsy a donc été mis en place en 2022 dans le but d’accompagner un maximum de personnes en souffrance psychique en leur permettant de bénéficier de séances remboursées chez un psychologue. Mais pas seulement ! En plus de faciliter l’accès au soin psychologique, ce dispositif favoriserait l’installation de psychologues libéraux (rassurés d’avoir un cabinet qui tourne bien et une patientèle solide) permettant ainsi de désengorger les structures publiques. Et ça, même Dash triples actions ne fait pas mieux.

Donc si je résume l’idée derrière Monsoutienpsy:

  • Les Français vont mieux grâce à huit séances de psy remboursées par an
  • Les psys sont contents parce qu’ils ont beaucoup de travail
  • Les hôpitaux respirent

En gros, c’est la win tous azimuts.

Alors forcément, vu comme ça, ça paraît chouette. Devenir psychologue conventionné est tentant. Mais qu’en est-il réellement ? Pourquoi l’ensemble des psychologues n’est pas conventionné ? Comment se passe la collaboration avec la sécurité sociale et les médecins ? Comment les psychologues conventionnés s’adaptent face aux contraintes du dispositif (tarif encadré, critères d’inclusion à respecter, nombre de séances limité) ? C’est ce que j’ai cherché à comprendre.

Je suis donc partie à la rencontre de Clémence, Romain, Sébastien, Véronique, Anne et Lucie. Six psychologues conventionnés (ou anciennement conventionnés) pour vous partager leurs expériences de terrain et leurs avis sur ce projet.

MES PRÉJUGÉS

Mais avant de vous rapporter les résultats de mon enquête, un point s’impose !

Notons qu’à ce jour, environ 93% des psychologues refusent de participer à Monsoutienpsy. Et de vous à moi, ce n’est pas rien. Le psychologue étant en temps normal un petit animal plutôt contemplatif et flegmatique (à l’instar de mon chat), cette mobilisation massive est assez inédite pour être soulignée. Et pourtant, 7% résistent encore et toujours aux boycotteurs. De quoi donner la rage au plus tranquille des matous… Et c’est ainsi que « pro-dispositif » et « anti-dispositif » en sont venus à se miauler violemment dessus.

Mais avant de donner la parole aux psychologues rattachés à Monsoutienpsy, je vous propose de rassembler les idées principales du parti des opposants, cela vous permettra de mieux cerner les enjeux de cette querelle de gamelle.

Selon ces derniers, Manu doit vite revoir sa copie et à plusieurs niveaux :

  • Le forfait d’une séance d’évaluation et de sept séances de thérapie est jugé insuffisant pour soulager un trouble, même le plus léger et même en utilisant les thérapies dites « brèves ».
  • Le tarif pratiqué de quarante euros la première séance puis trente euros les suivantes n’est ni réaliste ni adapté (charges importantes, statut précaire, niveau d’étude, responsabilité, etc).
  • Face à ce tarif injustifié, les psychologues seraient tentés de faire des consultations de trente minutes au lieu d’une heure (comme le tarif est divisé par deux…), ce qui conduirait à son épuisement (patients à la chaine) et à l’inefficacité de l’accompagnement.
  • La dévaluation des compétences du psychologue qui est cantonné qu’à soulager des troubles légers à modérés alors qu’il a une solide formation universitaire.
  • En favorisant l’accès au soin en libéral, on abandonne les structures publiques (suppression de service de psychiatrie dans les hôpitaux, on ne renforce pas les équipes déjà excitantes avec des recrutements, etc).
  • L’adressage par un médecin obligatoire alourdit le parcours de soin pour le patient, rend l’accès à la psychothérapie « sous condition » à cause des critères à respecter ainsi que toute la charge administrative rendant les psys sous tutelle et dénigrant la confidentialité.

Manu écope donc d’une belle annotation rouge « peut mieux faire s’il s’en donnait les moyens » et direction les rattrapages. Parce que c’est bien beau « d’entendre les Français », ce n’est franchement pas terrible de leur proposer la moitié d’une solution « parce que c’est mieux que rien ».


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De mon côté, ne perdant jamais une occasion pour râler (ça entretient le cardio), je ne vous cache pas que je boycotte fermement ce dispositif tel qu’il est proposé actuellement. Néanmoins, j’ai tout de même ressenti le besoin d’entendre la position des « pro-dispositifs » pour comprendre leur point de vue sur cette question qui nous divise. Parce que c’est bien beau d’être une « anti » acharnée, je ne veux pas ressembler à un mioche qui trouve des épinards dégueu sans même y avoir déjà gouté. Et si la maternité m’a apporté des choses merveilleuses avec son lot d’hémorroïdes, c’est bien la sagesse.

C’est donc munie de mon plus beau Casque bleu et d’un gilet par balles que je te partage tous les témoignages que j’ai recueillis.

L’ADRESSAGE DES MÉDECINS

Commençons par le commencement ! La première étape du parcours Monsoutienpsy démarre par un rendez-vous d’évaluation avec un médecin. Il est question ici qu’un professionnel médical évalue la sévérité des troubles psychiques de son patient afin de lui proposer la meilleure solution. Trois options s’offrent au patient: rien de proposé si son état ne justifie pas d’une psychothérapie, huit séances chez un psychologue conventionné si ses troubles sont légers/modérés ou une orientation auprès d’un psychiatre/d’un CMP si ces derniers sont sévères. À la suite de cette analyse, un courrier d’adressage est rédigé, ce qui ouvre le droit à une prise en charge.

À cette étape, les anti-dispositifs dénoncent plusieurs choses :

  • Le psychologue (conventionné) n’est plus en libre accès
  • Le psychologue (conventionné) est limité à l’accompagnement de troubles légers/modérés
  • Exclusion de ces patients en « trop grande » souffrance pour être reçus par un psychologue (conventionné)
  • Problème de confidentialité du fait de la collaboration étroite entre le médecin, la CPAM et le psy
  • CMP bouchés et psychiatres en voie de disparition.

Face à ce constat, j’interroge Clémence, Sébastien et Lucie pour qu’ils me partagent leurs expériences. Et c’est Clémence qui met les deux pieds dans le plat en me confiant qu’elle accueille des patients conventionnés qui ne correspondent pas toujours aux critères d’inclusion du dispositif. « J’ai déjà pu recevoir des patients psychotiques en sortie hospitalisation, des patients sous antidépresseur, d’autres avec des idées suicidaires. Normalement, selon les critères stricts du dispositif, ils ne devraient pas pouvoir bénéficier du forfait de remboursement de séances du fait de « troubles trop lourds ». Et pourtant, ces patients directement adressés par un médecin généraliste, Clémence les reçoit. Ce constat est également partagé par Sébastien. Selon lui, un bon tiers de sa patientèle conventionnée ne rentre pas dans les critères du dispositif et pourtant les médecins écrivent sur le courrier d’adressage « trouble anxiodépressif léger ». Il ajoute aussi que « les médecins bidouillent avec l’assurance maladie depuis des années pour faciliter des soins ou des accès aux soins (deux ans d’attente pour un CMP dans mon coin pour rappel) », ce qui expliquerait de son point de vue ces orientations inadaptées.

Manque de temps pour évaluer avec précision l’intensité des troubles de leurs patients, volonté de proposer coute que coute une solution du fait d’un accès difficile en CMP ou auprès d’un psychiatre, méconnaissance des critères d’inclusion et d’exclusion du dispositif ? Comment comprendre les orientations parfois incongrues que les médecins réalisent ?

Pour Lucie, l’explication se trouve ailleurs. Elle estime que même si les critères du dispositif semblent assez simples à la base, son application reste à l’interprétation de chaque médecin. Elle me dit à ce propos qu’il lui est déjà arrivé «qu’un médecin refuse de donner accès aux 8 séances chez un psychologue à une femme qui rencontrait des problèmes dans sa vie de couple parce que « cela ne relevait pas d’une psychothérapie » alors que son mari a pu en bénéficier (pour la même problématique)». De ce fait, bien que l’accès au soin semble largement facilité du fait des non-respects des critères d’attributions, ce dernier peut s’avérer parfois inégal.

Les témoignages recuillis apportent donc un éclairage sur l’application concrète de Monsoutienpsy. J’apprends que les patients présentant d’importantes difficultés psychiatriques ne sont pas forcément exclus du dispositif et que le psychologue est également sollicité pour la prise en charge de trouble d’intensité sévère. Et qu’en est-il de ce lien entre médecins et psychologues ?

Pour la majorité des psychologues interviewés, la relation s’est tout simplement enrichie grâce à ce dispositif. Le passage obligatoire devant un médecin rassure les patients, participe à la crédibilisation du travail des psychologues, facilite la prise en charge du patient (ex : obtenir une RQTH, des traitements, un test de la thyroïde, etc). Pour beaucoup, il s’agit là d’un travail d’équipe où le médecin sollicite l’expertise d’un autre professionnel et non d’une subordination.

C’est donc avec surprise que j’apprends que les psychologues conventionnés apprécient de travailler en équipe avec les médecins et que les modalités fixées par le dispositif ne sont finalement pas respectées à la lettre ouvrant plus largement l’accès à une psychothérapie remboursée pour une majorité des patients dans le besoin. Reste à savoir si les psychologues acceptent de continuer avec des patients plus lourds et si les huit séances suffisent pour les soulager.

DÉROULÉ DES SÉANCES

Nombre de séances :

Et c’est là que les choses se corsent. Car si les médecins décident de fermer les yeux sur l’intensité des troubles présentés et d’orienter systématiquement auprès d’un psychologue leurs patients, qu’en est-il de ces derniers qui doivent aussi réaliser une évaluation lors du premier rendez-vous ?

Du côté de Lucie, ce cas de conscience a été très inconfortable. « J’ai très vite senti qu’on m’orientait à travers ce dispositif des personnes en détresse sévère (ce qui est un critère normalement excluant) et qu’il fallait que je les refuse pour cette raison malgré leur lettre d’adressage. C’était terrible d’avoir la compétence, l’envie, les outils, mais de devoir dire non parce que « vous présentez des idées suicidaires et de ce fait, vous ne pouvez pas bénéficier de ce dispositif », me partage-t-elle.

Si Lucie a fait le choix douloureux de refuser de poursuivre avec ces patients en souffrance sévère, d’autres ont opté pour une autre stratégie. Celle de maintenir pour chaque orientation les huit séances remboursées, qu’importe l’intensité des troubles et le cadre du dispositif. Mais face à de solides difficiles psychiques, que devient le patient après ces huit séances de prise en charge ?

Pour Romain « huit séances suffisent les 70% du temps. Mais il reste les 20 à 30% restants à qui il faut quand même davantage de séances et là, c’est délicat. Certaines fois, quand le patient adressé consulte en fin d’année, il est possible de rajouter huit autres séances dans la foulée, c’est qui est pratique pour la qualité de la prise en charge (huit séances en 2022 + huit séances en 2023) mais ce n’est pas toujours possible ». D’autres psychologues interrogés m’ont également communiqué que face à ce problème, certains proposaient de poursuivre l’accompagnement (à un tarif adapté ou au tarif pratiqué hors dispositif) ou d’orienter vers l’extérieur en relai (CMP/Psychiatre).

Durée des séances :

Intéressons nous maintenant à la durée d’une séance auprès d’un psychologue conventionné. Si l’on s’en réfère aux « opposants », les séances de psychothérapie (généralement d’une heure) devraient être sévèrement écourtées (trente minutes) du fait d’un tarif ridiculement bas. Mais qu’en est-il dans la réalité ?

Lucie, désirant rentrer dans ses frais et proposer des thérapies aux plus démunis, a proposé des séances un peu moins longues qu’en temps normal à ses patients conventionnés, mais a très vite arrêté. C’était, me dira-t-elle, trop inconfortable. Elle ajoutera également que « pour moi, il ne s’agit plus de thérapie, en trente minutes ». De son côté, Véronique a fait un autre choix, celui de l’efficacité. « Pour les patients conventionnés, le temps que je consacre est de cinquante cinq minutes pour le bilan (la première séance) et quarante cinq minutes pour les entretiens de suivi. Je ne me sentais pas en capacité d’aider qui que ce soit en huit séances x trente minutes ».

Raccourcir la durée d’une séance ou la maintenir a donc été un dilemme pour certains psychologues conventionnés. Mais face à ce problème, d’autres professionnels se sont montrés plus créatifs et ont développé une approche différente. C’est le cas notamment d’Anne qui propose aux patients conventionnés des horaires « boudés » en temps normal par sa patientèle installée. « La durée des séance reste la même pour tous les patients, à savoir une heure. J’ai déjà entendu des patients dire qu’il avait eu des séances de trente minutes avec d’autres psys et que ça ne leur avait pas convenu. Pour ne pas trop souffrir de cette perte financière, je propose aux patients conventionnés des horaires qui sont plutôt difficiles à remplir. Les créneaux de début de journée, midi-deux et fin de journée sont donc réservés pour les personnes qui paient le tarif plein ».

Quant à Clémence, elle a opté pour une autre tactique. Celle de fusionner deux séances de trente minutes pour les patients conventionnés pour faire une séance classique. « Concernant la durée des séances, je propose la même durée pour tout le monde, à savoir une heure/séance (qu’on soit bénéficiaire du dispositif ou non). Réaliser des séances de trente minutes pour les patients conventionnés, j’ai essayé. Mais ce n’était pas confortable pour moi ou pour la personne reçue. Alors, je « bidouille » en proposant deux séances de trente minutes d’un coup ! Au lieu de faire huit séances de trente minutes, je propose quatre séances d’une heure. Les patients sont prévenus dès le départ de mon fonctionnement et souvent ils apprécient d’être finalement « traités comme les autres patients ».

Tarif :

Si nous avons pu au préalable questionner le nombre de séances limité, la durée des séances, qu’en est-il maintenant du tarif pratiqué dans ce dispositif ? À ce sujet, tous les psychologues interrogés sont unanimes. Le tarif est jugé incohérent.

Romain développera sa pensée en me partageant qu’il le trouve même « scandaleux ». «Cela demande au psychologue de réaliser beaucoup plus de consultations pour s’en sortir et d’avoir des patients à tarifs non conventionnés compte tenu de nos charges ». Et Lucie abonde dans ce sens en rajoutant que « l’aspect financier (= le tarif du psychologue trop bas), était un vrai problème. Conventionnée, je n’aurais pas pu avoir 100% de ma patientèle en lien avec ce dispositif. Dans mes projections, je comptais recevoir 3 patients (bénéficiant de MonSoutienPsy) par semaine au cabinet. Le reste de la patientèle serait des patients hors dispositif compte compte tenu de mes charges importantes en tant que libérale (70%) ». Pour Anne aussi, la question du règlement a été épineuse. « Avec le conventionnement, le tarif imposé de trente euros est effrayant. Proposant des séances d’une heure et ne prenant pas de note en consultation, je suis donc payée trente euros pour une heure trente de travail (prise de note ensuite). J’ai dû augmenter mes tarifs normaux pour m’en sortir financièrement ». Ce tarif encadré impose donc au professionnel de recevoir une patientèle « mixte » pour compenser la perte financière et donc de malheureusement limiter l’accueil des patients conventionnés.

Par la suite, Anne me partagera d’autres éléments dont une découverte surprenante. La multiplication d’espaces thérapeutiques pour certains patients, favorisé par le dispositif. « Étonnement, ce dispositif n’est pas forcément à destination des gens les plus précaires. J’ai reçu des personnes bénéficiaires de séances remboursées qui avaient largement les moyens d’engager une thérapie à leurs frais, hors dispositif. Certains en profitent même pour voir plusieurs psys en même temps ! Une psy pour la thérapie classique (hors dispositif), une psy pour de l’art-thérapie (avec 8 séances remboursées), etc. Comme si l’art-thérapie était une activité, un loisir et que mon travail ne méritait pas qu’on me paie au tarif plein ».

Ainsi, le nombre de séances, ses durées et le tarif imposé soulèvent un questionnement bien plus profond à mon sens. Celui de la considération de la souffrance du patient et du professionnel. Et maintenant que nous avons vu comment les psychologues conventionnés se positionnaient pour composer avec ces derniers éléments, nous allons nous intéresser à un nouveau paramètre, le lien entre le psy et la sécurité sociale.

COLLABORATION AVEC LA CPAM

Si l’on peut se réjouir de voir la santé psychique prise en charge par la sécurité sociale, Monsoutienpsy implique dorénavant une nouvelle composante que le psychologue doit s’approprier, la collaboration avec l’assurance maladie. Comment les psychologues conventionnés interrogés vivent cette nouvelle association ? Pour Lucie, Véronique et Clémence, la réponse fuse ! « C’est catastrophique ».

Toutes me partagent que la communication avec l’organisme est loin d’être évidente. De par son expérience, Lucie souligne l’apprentissage de nouvelles compétences administratives et d’un manque d’accompagnement pour le faire. « Il faut savoir que quand on se conventionne, on doit apprendre à travailler avec l’assurance maladie, apprendre à facturer, connaître les démarches de remboursement, etc. D’après mon expérience, il était difficile d’avoir un interlocuteur pour obtenir des informations à temps ou pour répondre à mes questions. Je pouvais avoir l’impression que la CPAM se concentrait uniquement sur le recrutement de nouveaux psychologues pour pouvoir communiquer dessus sans se soucier davantage de la prise en charge, la satisfaction de tous (patients/psychologues/médecins). C’est en gros un chèque « sois heureux en huit séances ». Je n’ai pas pu rencontrer quelqu’un pour parler des points à améliorer par exemple », à son grand regret.

L’expérience de Véronique ne semble pas plus convaincante. « Il m’a fallu un peu plus de deux mois pour avoir les feuilles de soin psychologues. Pendant ces deux mois, je ne faisais pas payer les patients, en attente des feuilles de soin. Les feuilles de soin sont « pénibles » à remplir avec des numéros, des codes. Cela demande du temps. Aussi, c’est très compliqué d’être payés par l’assurance maladie concernant les patients en ALD. Pour 80-90% de ces patients, il faut communiquer longuement avec l’assurance maladie qui multiplie les erreurs. Parfois, on me redemande le courrier… Pour la CPAM dont je dépends, par téléphone ce n’est pas efficace. Par messagerie, cela semble mieux fonctionner mais ne garantit pas une fiabilité à 100% à chaque fois. Cela oblige à suivre avec attention les remboursements, à rechercher pour qui on a été payé/pas payé, à téléphoner/écrire plusieurs fois pour essayer d’être payée. Bref, en tout cas dans mon département le dispositif est dysfonctionnel concernant la rémunération du psychologue pour les patients en ALD, accident de travail… (ceux qui ne font pas l’avance des frais) ».

Pour Clémence aussi, le lien avec la CPAM est laborieux. « J’ai par le passé déjà accueilli des patients en ALD (= le patient n’avance aucuns frais, c’est le psychologue qui se fait rembourser) et je n’ai jamais reçu d’argent. Je suis donc au regret de les refuser maintenant, vu que la CPAM ne paye pas mon travail. Aussi, j’ai déjà eu deux mois sans feuilles de remboursement et les gens ne pouvaient pas se faire rembourser. J’avais beau les appeler, le site buggait, ils me disaient qu’il y avait trois semaines de délai. Le contact est laborieux… et c’est à moi de jongler au niveau trésorerie. Je ne parle pas non plus des menaces implicites où à la moindre erreur, nous devons procéder à un remboursement en leur faveur. Il y a beaucoup de contraintes, beaucoup d’interdictions dans cette collaboration ».

Si le constat est unanime du côté de ces trois psychologues, le témoignage de Romain nuance un peu puisqu’il me rapporte ne pas « avoir trop galéré » à ce niveau là.

CONCLUSION

À travers les récits de Clémence, Romain, Sébastien, Véronique, Anne et Lucie, nous avons un certain éclairage sur la pratique des psychologues conventionnés au dispositif Monsoutienpsy (témoignages recueillis en mars 2023). Il s’agit ici de témoignages de six professionnels sur leurs expériences uniques, de quoi mettre en lumière certains éléments sans pour autant en faire une généralité. Et si chacun s’approprie les modalités de ce dispositif à sa manière, tous s’accordent pour dire que ce dernier est loin d’être abouti et que d’importantes modifications doivent être apportées pour le bien de tous (patients comme professionnels).


Retrouvez tous les témoignages dans leur intégralité ici


Les points forts de MonsoutienPsy :

  • Ça permet à beaucoup de mettre le pied à l’étrier, d’oser aller chez le psy, tester l’expérience.
  • Ça permet de financer un « début » de psychothérapie pour chaque patient.
  • C’est un dispositif qui aide les plus démunis
  • Le psychologue est sécurisé, a une patientèle en continu.

Les points faibles :

  • Un tarif inadapté compte tenu des charges du professionnel et de ces nombreuses compétences.
  • Une collaboration contraignante avec la CPAM
  • Le nombre de séances inadapté et critères d’exclusion incohérents.

Les axes d’amélioration envisagés :

  • Autoriser le dépassement d’honoraires.
  • Obtenir un terminal de carte vital pour soulager l’administratif.
  • Augmenter le nombre de séances dans le forfait pour un accompagnement plus efficace.
  • Supprimer les critères d’inclusion du dispositif et l’ouvrir à tous sans condition.

Ainsi, grâce à leur expérience de terrain, ces six psychologues arrivent à identifier finement les réussites et les dysfonctionnements de ce programme. De quoi peut-être rassembler des arguments pour améliorer les modalités de Monsoutienpsy !

Finalement, de cette guerre de gamelle, j’en comprends que les psychologues en général (les antis et les pros) désirent la même chose (proposer des psychothérapies à tous) mais qu’ils n’ont pas la même manière d’y parvenir. Pour les psychologues conventionnés, il faut expérimenter pour obtenir des arguments en vue de négocier des améliorations. Quant aux boycotteurs, le refus total du dispositif est l’outil même de la négociation. Deux méthodes différentes pour un seul et même objectif !

Reste à savoir comment les deux parties vont se positionner avec les nouvelles annonces du gouvernement et les futures modifications apportées. À savoir, douze séances au lieu de huit, cinquante euros la séance au lieu de trente et l’adressage du médecin qui n’est plus obligatoire. À votre avis ?


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